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Page 15 : Alter'Mag 3

Pour commencer cette série de billets mensuels je souhaiterais préciser que cette réflexion ouverte, par le choix d’un mot, s’inscrira plus particulièrement dans le champ de l’éducation, creuset de la construction des concepts et lieu privilégié des co-naissances.Selon Wikipédia l’écosophie est un concept forgé par le philosophe Arne Næss à l’Université d’Oslo en 1960. C’était au début du mouvement de l’écologie dite écologie profonde qui invite à un renversement de la perspective anthropocentriste :« l’homme ne se situe pas au sommet de la hiérarchie du vivant, mais s’inscrit au contraire dans l’écosphère comme une partie qui s’insère dans le tout »C’est autour de ce constat que va se développer l’écosophie comme un courant de pensée du mouvement écologiste depuis les années 1960. Ce courant est proche de celui de l’éthique environnementale qui remet en cause l’homme comme mesure de toute chose, ou comme sommet absolu de l’évolution, s’autorisant à puiser sans limite dans les ressources naturelles.Pour ma part, je souhaiterais aborder le mot écosophie selon sa racine étymologique de «sagesse dans notre manière d’habiter le monde et la vie». En effet de nombreuses voix autorisées s’accordent à dire que notre civilisation «occidentale» planétisée est dans une impasse et qu’il nous faut changer de comportements, si nous ne voulons pas vivre le naufrage tragique de l’ensemble du monde vivant...L’éducation visant à favoriser l’émergence de cette nouvelle conscience, lucide, responsable et respectueuse de la vie, vers une civilisation de l’empathie*, mobilise aujourd’hui, sous le terme de sensibilisation, toutes les ressources de la rationalité et de l’intellect, son agent fidèle. Et pourtant, l’accumulation des savoirs produits par les techno-sciences qui envahissent et conditionnent notre quotidien, et leur médiatisation, n’ouvrent pas sur un horizon plus harmonieux, loin s’en faut : la solution, ici, est en fait le problème... C’est pourquoi je reprends à mon compte l’aphorisme de Krishnamurti* : le savoir n’est pas la sagesse.«Notre soif de savoir, notre désir d’acquérir sans cesse quelque chose nous font perdre l’amour, et ainsi s’émoussent et le sentiment que nous avons de la beauté, et notre sensibilité à la cruauté. Nous nous spécialisons de plus en plus et sommes de moins en moins intégrés. La sagesse ne saurait être remplacée par les connaissances, et aucune somme d’explications ni aucune accumulation de faits ne libèreront l’homme de la souffrance. Le savoir est nécessaire, la science a son utilité; mais si le cœur et l’esprit sont étouffés par les connaissances, et si la cause de la souffrance est oblitérée par des explications, la vie devient vaine et n’a plus de sens... L’information, la connaissance des faits, bien qu’elle augmente en permanence, est, par sa nature même limitée. La sagesse est infinie, elle inclut la connaissance et le processus de l’action; mais nous saisissons une branche et croyons que c’est l’arbre entier. La connaissance d’une partie ne peut jamais nous faire réaliser la joie du tout. L’intellect ne peut conduire au tout, car il n’est lui-même qu’un fragment, qu’une partie.Nous avons séparé l’intellect de la sensibilité, et avons développé celui-ci à son détriment. Nous sommes comme un objet à trois pieds dont l’un serait beaucoup plus long que les autres, et nous n’avons pas d’équilibre. Nous sommes entrainés à être des intellectuels; notre éducation dispense à l’intellect une formation qui l’aiguise, le rend habile, capable d’acquérir, et c’est ainsi qu’il tient le rôle majeur dans nos vies. L’intelligence est bien supérieure à l’intellect, car elle est intégration de l’amour et de la raison. Mais il n’y a d’intelligence qu’en la connaissance de soi, en la profonde compréhension du processus total de soi-même».Ce parti pris qui aborde l’écosophie dans sa référence première à la sagesse plutôt qu’aux savoirs me conduit, dans les pas de Lucie Sauvé,* reprenant la thèse de Felix Gattari* à articuler trois écologies, pour traduire la réalité complexe de ce néologisme :a - l’écologie sociale pour les rapports au « socius », aux réalités économiques et sociales,b - l’écologie environnementale pour les rapports à la nature et à l’environnement,c - l’écologie mentale pour les rapports à la psyché, la question de la production de la subjectivité humaine.La dialogique* de cette architecture écologique tripôlaire qui structure l’écosophie trouve dans la notion de contrat, sa pierre angulaire. Dans ce contexte, j’en déclinerai les trois acceptions, dans mes prochains billets.René Jam Pour commencer cette série de billets mensuels je souhaiterais préciser que cette réflexion ouverte, par le choix d’un mot, s’inscrira plus particulièrement dans le champ de l’éducation, creuset de la construction des concepts et lieu privilégié des co-naissances. Selon Wikipédia l’écosophie est un concept forgé par le philosophe Arne Næss à l’Université d’Oslo en 1960. C’était au début du mouvement de l’écologie dite écologie profonde qui invite à un renversement de la perspective anthropocentriste : « l’homme ne se situe pas au sommet de la hiérarchie du vivant, mais s’inscrit au contraire dans l’écosphère comme une partie qui s’insère dans le tout » C’est autour de ce constat que va se développer l’écosophie comme un courant de pensée dumouvement écologiste depuis les années 1960. Ce courant est proche de celui de l’éthique environnementale qui remet en cause l’homme comme mesure de toute chose, ou comme sommet absolu de l’évolution, s’autorisant à puiser sans limite dans les ressources naturelles. Pour ma part, je souhaiterais aborder le mot écosophie selon sa racine étymologique de « sagesse dans notre manière d’habiter le monde et la vie». En effet de nombreuses voix autorisées s’accordent à dire que notre civilisation «occidentale» planétisée est dans une impasse et qu’il nous faut changer de comportements, si nous ne voulons pas vivre le naufrage tragique de l’ensemble du monde vivant... L’éducation visant à favoriser l’émergence de cette nouvelle conscience, lucide, responsable etrespectueuse de la vie, vers une civilisation de l’empathie*, mobilise aujourd’hui, sous le terme de sensibilisation, toutes les ressources de la rationalité et de l’intellect, son agent fidèle. Et pourtant, l’accumulation des savoirs produits par les techno-sciences qui envahissent et conditionnent notre quotidien, et leur médiatisation, n’ouvrent pas sur un horizon plus harmonieux, loin s’en faut : la solution, ici, est en fait le problème... C’est pourquoi je reprends à mon compte l’aphorisme de Krishnamurti* : le savoir n’est pas la sagesse. «Notre soif de savoir, notre désir d’acquérir sans cesse quelque chose nous font perdre l’amour, et ainsi s’émoussent et le sentiment que nous avons de la beauté, et notre sensibilité à la cruauté. Nous nous spécialisons de plus en plus et sommes de moins en moins intégrés. La sagesse ne saurait être remplacée par les connaissances, et aucune somme d’explications ni aucune accumulation de faits ne libèreront l’homme de la souffrance. Le savoir est nécessaire, la science a son utilité; mais si le coeur et l’esprit sont étouffés par les connaissances, et si la cause de la souffrance est oblitérée par des explications, la vie devient vaine et n’a plus de sens...L’information, la connaissance des faits, bien qu’elle augmente en permanence, est, par sa nature même limitée. La sagesse est infinie, elle inclut la connaissance et le processus de l’action; mais nous saisissons une branche et croyons que c’est l’arbre entier. La connaissance d’une partie ne peut jamais nous faire réaliser la joie du tout. L’intellect ne peut conduire au tout, car il n’est lui-même qu’un fragment, qu’une partie. Nous avons séparé l’intellect de la sensibilité, et avons développé celui-ci à son détriment. Nous sommes comme un objet à trois pieds dont l’un serait beaucoup plus long que les autres, et nous n’avons pas d’équilibre. Nous sommes entrainés à être des intellectuels; notre éducation dispense à l’intellect une formation qui l’aiguise, le rend habile, capable d’acquérir, et c’est ainsi qu’il tient le rôle majeur dans nos vies. L’intelligence est bien supérieure à l’intellect, car elle est intégration de l’amour et de la raison. Mais il n’y a d’intelligence qu’en la connaissance de soi, en la profonde compréhension du processus total de soi-même». Ce parti pris qui aborde l’écosophie dans sa référence première à la sagesse plutôt qu’aux savoirs me conduit, dans les pas de LucieSauvé,* reprenant la thèse de Felix Gattari* à articuler trois écologies, pour traduire la réalité complexe de ce néologisme : a - l’écologie sociale pour les rapports au « socius », aux réalités économiques et sociales, b - l’écologie environnementale pour les rapports à la nature et à l’environnement, c - l’écologie mentale pour les rapports à la psyché, la question de la production de la subjectivité humaine. La dialogique* de cette architecture écologique tripôlaire qui structure l’écosophie trouve dans la notion de contrat, sa pierre angulaire. Dans ce contexte, j’en déclinerai les trois acceptions, dans mes prochains billets. René Jam