L’histoire que je raconte aujourd’hui, au soir de ma vie, s’est déroulée en provençal. À l’époque nous n’avions d’autre langue que celle-ci, reçue de nos parents. L’idiome provençal – le patois disent les cracheurs – est ma langue maternelle et je l’admire pour sa résistance. Pourtant, j’ai choisi d’écrire notre histoire en français pour que ce dont je témoigne se répande au-delà de notre région et parce que j’aime aussi cette seconde langue. Je l’ai apprise, je l’ai adoptée comme on adopte une patrie, je l’ai enseignée. C’est celle de cette République pour laquelle nos hommes ont donné leur vie d’un coup et nous les nôtres pendant toute notre vie de femme. L'histoire oubliée de l'insurrection en Provence... C'est par le coup d'état du 2 décembre 1851, que Louis-Napoléon Bonaparte mît un terme à la Seconde République et du fond des campagnes éclata la colère. En Provence, des milliers d’hommes, pour la plupart des paysans, souvent illettrés, prirent les armes contre la dictature. Par amour de la République, nombre d’entre eux allaient perdre leur vie... ou leur liberté.